La newsletter de Louise Aubery

La newsletter qui élève les esprits et adoucit les cœurs ✨ Une fois toutes les deux semaines.

image_author_Louise_Aubery
Par Louise Aubery
24 mars · 3 mn à lire
Partager cet article :

Ma relation compliquée avec les séries

La newsletter qui élève l'esprit et adoucit les coeurs ✨

“Nous sommes séparés du réel par l’idéal”

Cette phrase, prononcée par le philosophe André Comte-Sponville lors de notre dernier échange sur InPower, m’a beaucoup fait réfléchir.

J’ai commencé à lire très tôt, principalement des romans; et j’ai toujours pensé que c’était un moyen d’échapper à un réel décevant. Mais ce que je me demande aujourd’hui c’est :

est-ce que je lisais parce que le réel était décevant, ou le réel était-il décevant parce que je lisais ?

Quinze ans plus tard, j’aimerais dire que je lis toujours autant, mais un minimum d’honnêteté intellectuelle s’impose : ce sont les séries qui jouent aujourd’hui ce rôle d’échappatoire. La semaine dernière, je me suis surprise à regarder l’heure à un événement télé où j’étais invitée; et en voyant qu’il était déjà 21h30, j’ai prétexté une réunion importante le lendemain pour rentrer regarder un épisode de mon dernier K-Drama. “Si ça te fait plaisir, je ne vois pas où est le problème”, fut ma première pensée. Mais comme le propre de la philosophie - et ce que je souhaite faire avec cette Newsletter d’ailleurs - c’est de penser contre soi-même; j’ai décidé de questionner mes croyances.

Il est certain que, depuis que je regarde des séries, mes attentes ont changé. Inconsciemment, les séries façonnent nos goûts, nos envies, nos aspirations. Or, la principale source de frustration aujourd’hui, et le plus grand frein à notre épanouissement, c’est l’écart entre nos attentes et la réalité. Bien loin de le réduire, le visionnage des séries vient l’accentuer; et ça m’a particulièrement interpellé le week-end dernier lorsque je couvrais le Festival Series Mania, et que j’ai pu observer la horde de fans qui attendaient de voir les acteurs fouler le tapis rouge, souvent déçus qu’ils ne soient pas dans la vraie vie comme celles et ceux qu’ils incarnent à l’écran.

La fiction des séries vient pallier à notre insatisfaction de la réalité; l’idéal devient un remède au réel.

Rêver, c’est bien. Vivre, c’est mieux. Je vais tâcher de m’en rappeler…


Regarder des séries c’est aussi l’occasion d’avoir une autre perspective sur le monde et la société, je vous propose 3 séries à découvrir pour rire, philosopher et déconstruire.

Féminisme et santé mentale : Crazy-Ex Girlfriend, la série musicale de Rachel Bloom

Cette série est une véritable pépite, incarnée et réalisée par la talentueuse Rachel Bloom. Le personnage de Rebecca, avocate new-yorkaise au bord du burn-out, décide de changer radicalement de vie le jour où elle tombe par hasard sur son ex-amour de colonie de vacances : Josh Chan. À travers 4 saisons, la série décortique avec humour et finesse et en parodiant les codes de la pop culture des thématiques telles que la rivalité féminine, l’obsession amoureuse, la parentalité, la santé mentale ou encore l’alcoolisme.

Philosophie et questions existentielles: The Good Place de Michael Schur.

Eleanor Shellstrop vient de mourir, et elle atterrit au “bon endroit” grâce aux bonnes actions réalisées au cours de sa vie. Très vite, elle réalise qu’il s’agit d’une erreur. Elle tente alors de s’améliorer avec l’aide de son âme soeur Chidi, un professeur de philosophie morale profondément anxieux. Entre situations décalées et suspense, “The Good Place" offre un mélange unique de comédie et de réflexion intellectuelle.

La quête du bonheur de Bojack Horseman par Raphael Bob-Waksberg

Bojack Horseman a connu le succès dans les années 1990 avec la série Galipettes en famille. Depuis, il vit sur sa notoriété passée, tentant les coups d’éclat et les retours en force dans le monde ultra-compétitif et archi-cynique du show-business. Grâce à des personnages profonds et complexes Raphael Bob-Waksberg explore en subtilité des thèmes a priori lourds comme l’addiction, la recherche du bonheur ou encore la société des apparences.

Combien de temps passez-vous à regarder des séries ?

L’hégémonie des séries a fait exploser nos temps d’écran: vous avez sûrement déja entendu parler ou même utilisé le terme de “binge watching”. On ne regarde plus forcément un film qui dure 1h ou 2h mais on peut s’enfiler des dizaines d’épisodes de séries à la suite.

Il est parfois difficile d’estimer quelle place celles-ci ont pris dans notre vie et le temps que cela représente. Pour cela il existe un outil dédié : TV Time, un site et une application qui permettent de suivre ce que nous avons vu et d’en déduire notre temps passé à regarder des séries et des films (le résultat peut faire peur) !

Dans ma dernière newsletter je vous parlais de la crise de quart de siècle; voici quelques uns de vos témoignages sur le sujet :

J’ai l'impression de ne jamais m'être posé autant de questions existentielles que ces derniers mois. D'abord parce que désormais, du haut de mes 26 ans, je sens un réel gap générationnel avec les plus jeunes générations (les "vrais" jeunes maintenant, snif), et ça me donne l'impression d'être une boomeuse - sensation ma foi très désagréable. Mais surtout parce que j'ai l'impression que désormais, tous mes choix auront un impact lourd sur ma vie

Céline

Passer 25 ans, c'est comme si toutes les décisions qu'on allait prendre avaient un impact colossal sur le reste de notre vie.  On a le sentiment qu'on n'a plus vraiment le droit de faire des choix juste pour expérimenter et tester. Tout doit être réfléchi, construit, mûrit et on est censé avoir un objectif clair de vie (quand en réalité, pour la plupart des gens ce n'est pas vraiment le cas...). Et je pense que cette pression sociétale est encore plus forte lorsqu'on est une femme; surtout en entrant dans la trentaine avec la fameuse question de l'horloge biologique et des enfants qui commence à entrer dans l'équation... Je travaille encore à la déconstruction de ce mythe en moi mais ce qui m'aide le plus c'est d'entendre les parcours atypiques de personnes plus âgées que moi. Ceux qui ont eu mille vies, qui ont changé à plusieurs reprises d'objectif, sans parcours linéaire.

Vanessa

La même série en boucle

Il n’y a jamais eu autant de séries et de contenus disponibles en ligne; pourtant, certains d’entre nous se retrouvent parfois à re-regarder inlassablement les mêmes séries (on vous voit les fans de Friends!).

Figurez-vous qu’il existe une explication chimique à cette habitude. Des scientifiques ont expliqué que le fait de revoir un film ou une série déjà visionnés pouvait libérer de la dopamine et de la sérotonine (la fameuse hormone du bonheur). Mais ce n’est pas tout, il y a une satisfaction particulière à retrouver un univers familier qui n’a pas bougé, où les personnages revivent inlassablement les mêmes situations, même si notre vie à nous a bien évolué.

Un professeur de marketing, Cristel Russel, parle d’un phénomène de reconsommation - c’est à dire la consommation réitérée d’une même expérience pour retrouver des sensations connues.

Enfin, il y aussi un certain confort à regarder des séries qu’on aime et qui nous font nous sentir bien. Il y a tellement de séries nouvelles, qu’au lieu de choisir et prendre le risque d’être déçu : on préfère revenir à ce que l’on connaît et apprécie !

Et vous, c’est quoi la série que vous regardez en boucle ?

xx Louise